*De l’AFP Au Mexique, Léonore Mahieux, publié le 08/03/2012 à 20:10
Le juge rapporteur a demandé la libération de Florence Cassez mais l’affaire est maintenant entre les mains de quatre autres magistrats de la Cour suprême. Décision prévue le 21 mars. Explications.
"Libération immédiate et absolue." C’est la première fois en six ans qu’un juge mexicain demande noir sur blanc la mise en liberté de Florence Cassez, condamnée à 60 ans de prison pour enlèvements et port d’arme. Et ce n’est pas n’importe quel juge. Il s’agit du président de la première salle de la Cour Suprême, Arturo Saldivar. L’homme, connu pour ses positions progressistes, était chargé du recours déposé par la jeune femme l’an dernier. Il a rendu son projet de sentence mercredi.
Il y explique que les vices de forme sont tels qu’ils "ont corrompu toute la procédure" et "vicié toutes les preuves". Y compris les témoignages des victimes. Il dénonce durement l’attitude de la police mexicaine qui, en organisant un montage, s’est rendue responsable de violations des droits fondamentaux de la défense. En effet, le 9 décembre 2005, 24 heures après l’arrestation réelle de Florence Cassez, les agents de la police fédérale orchestraient un véritable show médiatique o, en faux-direct, ils arrêtaient deux kidnappeurs, Florence Cassez et son ex-compagnon, et libéraient trois victimes.
Chaque violation peut impliquer l’annulation de la procédure
Résultats, visibles eux aussi en direct : une violation de la présomption d’innocence et de l’obligation d’être présenté immédiatement au ministère public. Peu importe, répondent les autorités de l’époque. Ca n’enlève rien à leur culpabilité et à notre réussite. En février 2011, les juges du recours en cassation en étaient arrivés aux mêmes conclusions et avaient confirmé la sentence.
A quelques mois des élections présidentielles mexicaines, l’affaire est plus que jamais politique
Mais pour le juge Arturo Saldivar, chacune des violations constatées implique à elle seule une annulation de toute la procédure. Pour le vice de forme en soi mais aussi pour les conséquences qu’elles ont eu, dans ce cas précis, sur le fond du dossier.
Violation de la présomption d’innocence, non présentation immédiate au ministère public…. Le juge liste une troisième violation : le non respect du droit consulaire. Et pour lui il ne s’agit pas d’un détail, encore moins quand le gouvernement mexicain se bat dans toutes les instances internationales pour le faire respecter pour ses concitoyens.
Le précédent de l’incendie dans une garderie
Un rapport positif donc pour Florence Cassez mais qui ne reste qu’un projet de sentence. "Une lumière au bout du tunnel", comme a déclaré l’avocat mexicain Agustin Acosta à sa cliente. C’est maintenant aux quatre autres magistrats de la première salle de prendre une décision. Ils peuvent rejeter le projet de leur président, ils l’ont déjà fait pour le cas ABC -o 40 enfants sont décédés dans l’incendie d’une garderie- o l’accepter. Ils doivent voter, à la majorité, et expliquer leur position lors d’une séance publique, prévue le mercredi 21 mars.
D’ici là ils risquent de se retrouver au coeur d’un tourbillon de pressions, médiatiques notamment. En effet, à quelques mois des élections présidentielles mexicaines, l’affaire est plus que jamais politique. Pour preuve le communiqué émis hier par le gouvernement mexicain. Tout en affirmant respecter la décision que prendra la Cour suprême, il exhorte les magistrats à refuser ce projet et à confirmer la condamnation.